À l’image de son immense potentiel géologique, la Guinée regorge également de talents musicaux. Pourtant, malgré la richesse de sa scène artistique, le pays peine encore à exporter sa musique au-delà de ses frontières. En séjour à Conakry, l’écrivain, musicien et cinéaste franco-guinéen Soumaila Sunjata Koly, fils de feu Souleymane Koly, s’est exprimé sur cette problématique lors d’une conférence de presse.
Formé au sein de l’ensemble Kotéba d’Abidjan et aujourd’hui professeur de théâtre à l’Université de Montpellier, l’artiste estime que deux leviers majeurs peuvent permettre aux musiciens guinéens de conquérir la scène internationale.
Selon lui, la première option repose sur un engagement fort de l’État, à travers une politique culturelle ambitieuse et financée :
« La musique qui s’exporte repose soit sur un environnement économique favorable, soit sur une véritable stratégie d’État. Prenez la France, par exemple : l’exception culturelle française permet de produire près de 150 films par an grâce aux subventions publiques. Il existe tout un réseau de salles prêtes à diffuser ces œuvres. Les artistes y bénéficient d’un statut reconnu. On peut citer Cuba également, où les musiciens jouissent d’un traitement particulier et voient leurs tournées entièrement prises en charge. Tant qu’il y a une politique d’État, il y a un rayonnement culturel », a-t-il expliqué.
La seconde voie relève du secteur privé, qui pourrait devenir un acteur déterminant dans l’essor des artistes guinéens.
« L’autre possibilité, c’est l’implication des grandes entreprises ou des multinationales. Dans des pays comme le Brésil, ce sont les acteurs privés qui financent la musique et accompagnent les artistes. Il existe aussi un modèle hybride, celui de la Côte d’Ivoire ou du Nigéria, où les mécènes jouent un rôle capital. Un investisseur passionné place son argent sur un artiste en misant sur le retour d’image. C’est ainsi que des figures comme Arafat DJ ont pu se hisser au sommet, soutenues par des parrains influents », a-t-il ajouté.
D’après Soumaïla Sunjata Koly, lorsque ces mécanismes sont bien structurés, ils permettent aux artistes de bâtir des communautés solides, d’assurer une visibilité internationale et, à terme, de remplir des stades.
Pour lui, si la Guinée parvient à adopter l’une ou l’autre de ces stratégies ou idéalement les deux, ses artistes pourraient enfin s’installer durablement sur la scène musicale mondiale aux côtés de pays comme le Nigéria.
Mohamed Cinq Sylla